N’étant pas amoureux de la place publique
Rien ne change dans la passion politique. Voilà la déclaration de l'enfant du siècle Alfred de Musset.
C’est un triste métier que de suivre la foule,
Et de vouloir crier plus fort que les meneurs,
Pendant qu’on se raccroche au manteau des traîneurs.
On est toujours à sec, quand le fleuve s’écoule.
Que de gens aujourd’hui chantent la liberté,
Comme ils chantaient les rois, ou l’homme de brumaire !
Que de gens vont se pendre au levier populaire,
Pour relever le dieu qu’ils avaient souffleté !
On peut traiter cela du beau nom de rouerie,
Dire que c’est le monde et qu’il faut qu’on en rie.
C’est peut-être un métier charmant, mais tel qu’il est,
Si vous le trouvez beau, moi, je le trouve laid.
Je n’ai jamais chanté ni la paix ni la guerre ;
Si mon siècle se trompe, il ne m’importe guère :
Tant mieux s’il a raison, et tant pis s’il a tort ;
Pourvu qu’on dorme encore au milieu du tapage,
C’est tout ce qu’il me faut, et je ne crains pas l’âge
Où les opinions deviennent un remord.
Vous me demanderez si j’aime ma patrie.
Oui ; — j’aime fort aussi l’Espagne et la Turquie.
Je ne hais pas la Perse, et je crois les Indous
De très honnêtes gens qui boivent comme nous.